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Et oui … la vidéoprotection des autoroutes est illégale, et je vais vous le prouver au sein de cet article. Bien que j’ai essayé – à plusieurs reprises – de contacter les concessionnaires d’autoroute pour en savoir plus sur leur “vidéoprotection”.
J’ai aussi contacter la personne chargée de la vidéoprotection au sein de la Délégation aux Coopérations de Sécurité, mais cela ne ma pas apporté toutes les réponses à mes questions.
On va dérouler ma réflexion par étape:
Les autoroutes: Es-ce une voie publique ?
Les autoroutes sont des voies du domaine public routier national conformément à l’article L121-1 du code de la voirie routière.
La Loi n° 55-435 du 18 avril 1955 portant statut des autoroutes , en son article 2 précise que “Les autoroutes font partie du domaine public de l’Etat.”.
De plus l’Article R122-5-1 du code de la voirie routière indique même que les sociétés concessionnaires d’autoroutes ont le pouvoir de délivrer, les titres d’occupation du domaine public de l’Etat en application des articles L. 34-1 à L. 34-9 dudit code et de l’article 3 de la loi n° 94-631 du 25 juillet 1994…
Enfin, les autoroutes “sous concession” ne sont pas mentionné au sein du titre VI du code de la voirie routière qui impose des dispositions applicables aux voies n’appartenant pas au domaine public.
Donc oui, une autoroute est un domaine / voie publique… comme un centre-ville ou une place de village.
Qui assure l’exploitation et la sécurité des autoroutes ?
C’est normalement l‘Etat qui veille en particulier à la sécurité, à la cohérence de l’exploitation et de l’information des usagers conformément à l’Article L111-1 du code de la voirie routière.
Mais comme les autoroutes coûte cher, l’état avait d’abord créer, dès 1956 (loi du 18 avril 1955), 5 sociétés publiques concessionnaires pour la construction et l’exploitation d’infrastructures autoroutières. Puis vînt la privatisation des sociétés d’autoroutes en 2006 , qui répondait pour le Gouvernement à un choix stratégique et budgétaire. ..
C’est les sociétés concessionnaires qui ont été privatisés, et non les autoroutes, qui elles restent publique ! !
Donc dans une grande majoritée de sections d’autoroutes, c’est bien une entreprise privée qui assure l’exploitation et la sécurité d’une voie publique …. c’est une “délégation du service publique”.
Contrats de concession d’autoroute
Au travers des contrats de concession, l’État a fait le choix de financer le réseau d’autoroutes par le péage plutôt que par l’impôt ; il s’agit d’un système économe des deniers publics.
Un contrat est ainsi passé entre l’État-concédant et les sociétés concessionnaires pour le financement, la construction, l’exploitation et l’entretien, en contrepartie de la perception d’un péage pour une durée déterminée préalablement. L’État fixe, dans le cadre de ce contrat, les missions qu’il confie aux différentes sociétés concessionnaires.
il est important de rappeler que les autoroutes n’ont pas été privatisées et restent la propriété de l’État qui en disposera totalement au terme des contrats de concession.
Seules les autorités publiques (les mairies notamment) peuvent filmer la voie publique.
Ni les entreprises, ni les établissements publics ne peuvent filmer la voie publique. Ils peuvent seulement filmer les abords immédiatsde leurs bâtiments et installations (la façade extérieure par exemple mais pas la rue en tant que telle) dans les lieux susceptibles d’être exposés à des actes de terrorism
Le problème de la vidéoprotection sur les autoroutes
Maintenant que vous avez lu les arguments ci-dessus, prouvant que les autoroutes sont des “voies publiques” … et que les sociétés concessionnaires était publique jusqu’en 2006 … il y à donc un problème juridique sur la vidéoprotection des autoroutes depuis 2006 , car ces sociétés sont devenues privées !
Qui sont les opérateurs de vidéoprotection du réseau autoroutier ?
Ce sont les salariés des exploitants des autoroutes – donc des personnes “privées”.
Ce sont donc des personnes, salariés de l’entreprise privée qui détient la concession, qui exploite et visionne les images issue de la vidéoprotection … d’une voie publique !
L’état peut-il “déléguer” des opérations de vidéoprotection sur la voie publique ?
La Décision n° 2011-625 DC du 10 mars 2011 du conseil constitutionnel est très clair à ce sujet: Aucun visionnage de vidéoprotection de la voie publique par une personne de droit privée.
extrait:
“en autorisant des personnes privées à procéder à une surveillance de la voie publique, ces dispositions constituent une délégation à ces personnes de tâches inhérentes à l’exercice par l’État de ses missions de souveraineté et méconnaissent les exigences constitutionnelles liées à la protection de la liberté individuelle et de la vie privée ; “
“en confiant à des opérateurs privés le soin d’exploiter des systèmes de vidéoprotection sur la voie publique et de visionner les images pour le compte de personnes publiques, les dispositions contestées permettent d’investir des personnes privées de missions de surveillance générale de la voie publique ; que chacune de ces dispositions rend ainsi possible la délégation à une personne privée des compétences de police administrative générale inhérentes à l’exercice de la « force publique » nécessaire à la garantie des droits ; que, par suite, doivent être déclarés contraires à la Constitution”
Donc même si en effet, les sociétés privées concessionnaires d’autoroute on bien une délégation du service publique pour l’exploitation et l’entretien de “certaines” voie publique .. il est légalement interdit (confirmé par le conseil constitutionnel) de leur délégué aussi la sécurité de cette voie publique – et donc bien évidamment la vidéoprotection de celle-ci !
De plus, une jurisprudence issue d’un litige avec la commune d’Ostricourt du 29 décembre 1997, le Conseil d’Etat avait annulé le contrat chargeant une société de gardiennage et de surveillance de faire des rondes dans une ville, au motif qu’un tel contrat «avait pour effet de lui faire assurer une mission de surveillance des voies publiques de l’ensemble de la commune ». Donc concession ou pas des autoroutes, une entreprise privée ne devrais pas “théoriquement” assurer la surveillance des autoroutes … car ce sont des “voies publique”.
RAPPEL: Les décisions du Conseil constitutionnel (…) s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles (art.62, al.3 Constit. de 1958).
Quel est le type d’autorisation préfectorale pour la vidéoprotection des autoroutes ?
C’est une autorisation qui est normalement “accordée” qu’aux autorités publiques. En effet, les finalités qui peuvent être invoquées par les autorités publiques pour visionner la voie publique sont (Cf Article L251-2 du CSI):
- protection des bâtiments et installations publics et de leurs abords ;
- sauvegarde des installations utiles à la défense nationale ;
- régulation des flux de transport ;
- constatation des infractions aux règles de la circulation ;
- prévention d’actes de terrorisme ;
- prévention des risques naturels ou technologiques ;
- secours aux personnes et la défense contre l’incendie ;
- sécurité des installations accueillant du public dans les parcs d’attraction.
- prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens dans les lieux particulièrement exposés à des risques d’agression ou de vol ou de trafic de stupéfiants ou à des actes de terrorisme.
Il n’y à donc qu’une autorité publique qui peut exploiter et visionner une vidéoprotection de la voie publique, selon une ou plusieurs finalitées cités ci-dessus.
Le seul cas où une personne de droit privée peut “visionner” la voie publique, c’est dans le cadre de la prévention des abords immédiats des bâtiments et installations situés dans des lieux susceptibles d’être exposés à des actes de terrorisme. Mais uniquement les “abords immédiats” du bâtiment privé !.
A l’inverse, les personnes privées (morales ou physiques) pour visionner un lieu ou un établissement ouvert au public est limité à la seule finalité de protection des personnes et des biens contre les risques d’agression. Donc une personne de droit privée ne peut invoquer l’un des 9 motifs cités ci-dessus pour visionner un lieu ouvert au public.
Selon la circulaire du 9 mars 2009 (toujours en vigueur), sur la vidéoprotection et la réglementation, les concessionnaires d’autoroutes sont clairement indiqué comme devant être considéré comme une “autorité publique” pour l’application de l’article L251-2 du CSI (Page 11). Mais l'”indication” de cette circulaire est maintenant contraire à la Décision n° 2011-625 DC du 10 mars 2011 du conseil constitutionnel , qui interdit tout exploitation de vidéoprotection de la voie publique par une entreprise privée.
Malgré l’interdiction du conseil constitutionnel, les préfectures continues de délivrer des autorisations d’exploitation de vidéoprotection de la voie publique … par des entreprises privées !
En effet, comme le prouve de nombreux recueil d’actes administratifs de différentes préfectures, comme ICI par exemple, la préfecture “autorise” l’exploitation d’un système de vidéoprotection par une entreprise privée (concessionnaire d’autoroute) pour visionner une voie publique (autoroute) … avec des finalités normalement réservés aux autorités publiques ! Comme par exemple le relevés d’infractions, la régulation du trafic routier, etc …
Même si l‘article L 130-4 du code de la route confère aux « agents des exploitants d’une autoroute ou d’un ouvrage routier ouvert à la circulation publique et soumis à péage » nommément désignées et agrées par le préfet, la compétence pour constater par procès-verbal les contraventions … il ne peuvent le faire via la vidéoprotection du réseau autoroutier, car une personne “privée” ne peut visionner des images de la voie publique (conseil constitutionnel).
Donc comment font les sociétés d’autoroutes, de manière légale, pour établir et “punir” un non-paiement du péage par exemple ? Car ce n’est pas l’agent de l’exploitant qui “constate” directement, mais c’est via la vidéoprotection – qui est illégale car l’autoroute est une voie publique.
Synthèse et bilan
Les sociétés concessionnaires d’autoroutes sont privées depuis 2006. Ce sont les salariés de ces entreprises privées qui assure l’exploitation et le visionnage de la vidéoprotection du réseau autoroutier.
L’autoroute est une voie publique – même si il y à une délégation de service publique concernant l’expoitation et l’entretien de celles-ci.
L’état ne peut déléguer une mission de surveillance de la voie publique à une entreprise privée, et même le visionnage via une vidéoprotection de cette voie publique conformément à la Décision n° 2011-625 DC du 10 mars 2011 du conseil constitutionnel.
La circulaire du 9 mars 2009 sur la vidéoprotection cite les “concessionnaires d’autoroutes” comme devant être considérés comme une “autorité publique” pour l’application de l’article L251-2 du CSI.
Les autorisations d’installations de vidéoprotection pour les concessionnaires d’autoroutes par les préfectures, sont celles réservés exclusivement aux “autorités publiques”… qui est conforme à cette circulaire du 9 mars 2009.
Cette “interprétation” de cette circulaire du 9 mars 2009, considérant les “sociétés privées concessionnaires d’autoroute” comme une “autorité publique” pour l’installation de vidéoprotection est contraire à la décision du conseil constitutionnel (n°2011-625 DC).
Donc la vidéoprotection des autoroutes est à priori illégale – si c’est une société privée qui exploite et visionne les images issues de la “voie publique”, ce qui est le cas depuis 2006 … cela pose la question sur la validité des “constations d’infractions aux péages” faite via ce système de vidéoprotection depuis 2006 !
La CNIL à été contacté, sans réponse de leur part.