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Rapport d’information de M. Marc-Philippe DAUBRESSE, fait au nom de la commission des lois n° 220 (2018-2019):
Le bilan par le Sénat de la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme.
Du 1er novembre 2017, date d’entrée en vigueur de la loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, au 30 novembre 2018, ont été recensés 214 périmètres de protection.
Périmètres de protection, c’est quoi ?
En cas de menace terroriste avérée, un préfet de département peut décider la mise en place d’un périmètre de protection. Ce dernier est destiné, en permettant un contrôle accru à ces abords, à protéger un événement (manifestation sportive, culturelle, marché de noël…) ou un lieu particulièrement exposé à la menace (lieu de culte, parc d’attraction…) en raison de sa nature ou de l’affluence de public.
Le périmètre de protection ne peut être institué que pour une durée d’un mois. Cette durée peut être renouvelée si le risque d’attaque terroriste existe toujours.
Le périmètre de protection est limité au lieu exposé et à ses abords immédiats, et il est adapté en fonction des circonstances. Pour y pénétrer, des points d’accès sont déterminés. Pour contrôler ce qui entre dans le périmètre, les forces de l’ordre peuvent également procéder à des fouilles (palpations de sécurité) et à des inspections de sacs ou de véhicules. Les bagages sont généralement interdits.
Les personnes refusant de se soumettre à ces inspections sont reconduites à l’extérieur du périmètre de protection.
LES PÉRIMÈTRES DE PROTECTION : UNE MESURE FORTEMENT UTILISÉE
Les contrôles instaurés aux abords et au sein des périmètres de protection, la mise en oeuvre des mesures prévues par le législateur (palpations de sécurité, inspections visuelles et fouilles de bagages, visites de véhicules) est quasi systématiquement autorisée par les arrêtés préfectoraux.
La possibilité de mobiliser, pour la réalisation de ces contrôles, des agents de police municipale ainsi que des agents de sécurité privée a par ailleurs été fréquemment exploitée. Selon les informations transmises par la direction des libertés publiques et des affaires juridiques, les agents de sécurité privée ont été mobilisés dans environ 75 % des cas et les agents de police municipale dans plus de la moitié des périmètres de protection
SÉCURITÉ PRIVÉE ET PÉRIMÈTRES DE PROTECTION : RISQUE D’ILLÉGALITÉ !!
Le Sénat rappelle que, dans sa décision n° 2017-695 QPC du 29 mars 2018, le Conseil constitutionnel a émis une réserve d’interprétation sur les dispositions de l’article L. 226-1 du code de la sécurité intérieure instituant cette possibilité. Il a en effet jugé que ces dispositions ne méconnaissaient pas les exigences résultant de l’article 12 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, selon lequel « la garantie des droits de l’Homme et du Citoyen nécessite une force publique : cette force est donc instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée », sous réserve (!!!) que les autorités publiques prennent « les dispositions afin de s’assurer que soit continûment garantie l’effectivité du contrôle exercé sur ces personnes par les officiers de police judiciaire ».
Lors de son audition, le directeur des libertés publiques et des affaires juridiques a indiqué avoir adressé, à la suite de cette décision, des observations aux préfets qui ne prévoyaient pas, dans le cadre des dispositifs mis en oeuvre, un contrôle effectif d’un officier de police judiciaire. La mission du Sénat s’attachera, à l’occasion de prochains déplacements, à s’assurer que la présence d’un officier de police judiciaire est bien systématique sur les périmètres de protection.
Amélioration de l’articulation du dispositif des périmètres de protection avec celle de la sécurisation des manifestations culturelles ou sportives
Plusieurs périmètres de protection ont en effet été mis en oeuvre pour assurer la sécurisation de manifestations culturelles ou sportives (par exemple, le spectacle de patinage artistique et le concert du groupe Arcadian à Belfort en décembre 2017, la finale de la coupe du monde et les concerts au théâtre antique de Vienne en juillet 2018, les concerts sur la place d’Armes de Metz en août 2018, etc.). Or, des dispositions spécifiques permettent, sans recourir aux périmètres de protection, d’assurer la sécurisation des manifestations culturelles et sportives, y compris lorsqu’elles se déroulent sur la voie publique (L’article L. 613-3 du code de la sécurité intérieure permet ainsi aux agents de sécurité privée de procéder à des palpations de sécurité, des inspections visuelles et des fouilles de bagages lors d’une manifestation sportive, récréative ou culturelle rassemblant plus de 300 spectateurs).
Lors de son audition par votre mission d’information, le directeur des libertés publiques et des affaires juridiques a indiqué à cet égard que le dispositif des périmètres de protection présentait l’avantage d’être mis en oeuvre à l’initiative du préfet, et non de l’organisateur de l’évènement, et qu’il permettait d’exercer des contrôles sur une emprise plus large. Au demeurant, il a été précisé qu’à l’occasion de certains évènements, en particulier des grandes manifestations sportives, des périmètres de protection avaient pu être mis en oeuvre de manière concomitante avec d’autres mesures de droit commun, en particulier le dispositif des grands évènements (L’article L. 211-11-1 du code de la sécurité intérieure prévoit que pour certains grands évènements exposés, par leur ampleur ou leurs circonstances particulières, à un risque exceptionnel de menace terroriste et désignés par décret).
La petit coquille de ce rapport concernant la sécurité privée
Ce rapport indique une autre possibilité légale pour la sécurisation d’événement, celle liée à l’article l’article L. 613-3 du code de la sécurité intérieure: ” (…) des dispositions spécifiques permettent, sans recourir aux périmètres de protection, d’assurer la sécurisation des manifestations culturelles et sportives, y compris lorsqu’elles se déroulent sur la voie publique*13“.
Et que dit le renvoi numéro *13 ? (en bas de page du rapport):
* 13: L’article L. 613-3 du code de la sécurité intérieure permet ainsi aux agents de sécurité privée de procéder à des palpations de sécurité, des inspections visuelles et des fouilles de bagages ainsi qu’à des visites de véhicules pour l’accès aux enceintes dans lesquelles est organisée une manifestation sportive, récréative ou culturelle rassemblant plus de 300 spectateurs.
Non M. Marc-Philippe DAUBRESSE (Sénateur LR), cet article L613-3 du CSI ne propose absolument pas de “visite de véhicule” qui pourrais être assuré par des agents de sécurité privée. Peut-être qu’il le devrais, pour la sécurité des grands événements ?
source: Rapport d’information de M. Marc-Philippe DAUBRESSE, fait au nom de la commission des lois n° 220 (2018-2019) – 19 décembre 2018